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Roberto: Fils du village de Dieu

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Par : Stanley Laferrière

 

Mon nom est Roberto. J’ai vingt ans. Je suis un fils de village de Dieu.

Cela fait vingt ans depuis que je respire l’air nauséabond du village. Je parcours les coins et recoins du village. Pas un signe, pas une seule manifestation de Dieu, ou d’un Ange dans le village. Dieu nous a peut-être oubliés. Peut-être qu’il est mort. Ou encore il s’est changé en immondices, en misère, en souffrance, en rafales de balles, parce que dans les coins et recoins de village de Dieu, c’est ce qu’on voit, c’est ce qu’on entend. Il nous faudrait peut-être prier la misère, la souffrance. La douleur. La faim. Les seuls dieux du village!

« Oh misère ! Toi qui occupes constamment nos demeures, nous te prions de nous laisser respirer. De déménager. Pense à passer voir et même à t’installer à Laboule, Montagne Noire, Péguy Ville. Pense à faire l’amour aux Brandt, aux Abdallah, aux Bidio, aux Martelly et leurs acolytes. Nous en avons assez de toi. Laisse ta place au bonheur. Au progrès. »

Tous les matins, des enfants du village s’enferment dans la nudité de la nuit. Tôt ils apprennent à manier les armes. D’ailleurs, ils sont nés avec une arme à la main. Il se battent contre le Dieu du village. Un Dieu qui se dit, leur père, leur mère. Merde ! Quelle bêtise ! Quelle misère ! Quel Dieu !

Comment des gens qui se disent chrétiens puissent-ils condamner un village qui est façonné par Dieu? Ces gens ont-ils perdu la foi? La foi en ce Dieu qu’ils ont créé jusqu’a maudire le village. Comment pourrions-nous être des monstres dans un village géré, commandé par Dieu? Surtout ne venez pas nous dire qu’il ne s’agit pas du bon Dieu. C’est vous qui nous l’avez donné. Nous y avons cru. Aujourd’hui nous faisons la guerre contre ce Dieu. Contre vous. Les armes que nous utilisons dans cette guerre nous ont été données par vous pour nous entretuer. Quand nous servons vos intérêts, vous nous appelez tout bas « anges » « bras vengeurs de Dieu ». Nous ne savions pas que c’était nous les anges. C’est justement pour cela que nous n’avons jamais croisé un ange dans le Village. Quelle ironie !

Le ciel de Village de Dieu n’est pas le même partout ! Des nuages empêchent toujours le soleil de nous sourire. D’ailleurs le soleil s’est suicidé pour ne pas nous caresser la peau. Le soleil est complice de ses scélérats qui ont fait de nous des rêves troués. Dans nos yeux, ils ont installé des ténèbres. Ces ténèbres finiront par prendre possession de leurs maisons aussi.

Je suis Roberto. Je ne suis pas le seul Roberto du village de Dieu. Et ce Dieu qu’ils nous ont façonné occupe d’autres villages. Je suis Roberto. N’oubliez pas ce nom. Au nom de mes sœurs, de mes frères, je continuerai à mener la guerre contre leur Dieu.

Stanley Laferrière.

 

 

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