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De l’information au savoir.

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Introduction

Communiquer au sens le plus général, c’est transmettre de l’information, des idées, ou tout simplement des contenus. Nous assistons depuis plusieurs années à une remise en question du schéma linéaire « standard » de la communication. Il s’agit d’une « transportation d’un modèle » de la linguistique de Ferdinand de Saussure (1857-1913) et des sciences de la communication (JEANNERET, 1998). Ce modèle sera vulgarisé par Claude SHANNON[1] en 1949 à travers la « théorie mathématique de la communication ». Émetteur – canal – récepteur. Une source d’information (émetteur), un canal de transmission (voix, message), et un destinataire du message (récepteur).

Définir le terme information n’est pas chose facile parce que beaucoup de concepts clés comme « données, documents, connaissance, et même savoir » entrent dans toute tentative de définition. Pour mieux cerner notre concept d’information, nous vous proposons de définir tous les autres mots clés sus mentionnés.

Information est un mot qui se définit selon la discipline, et selon qu’on est chercheur ou professionnel de l’information. Le statisticien britannique Ronald Aymler FISHER[2] définit l’information comme « égale à la valeur moyenne du carré de la dérivée du logarithme de la loi de probabilité étudiée »

Ce qui voudrait dire que moins quelque chose est probable, plus, elle est porteuse d’information. Les professionnels de l’information définissent ce terme par deux approches : objective et subjective.  La définition dite objective de l’information est donc cet ensemble de données intelligibles, qui prend un sens. Cela nous oblige à définir le mot « données ». Tandis que la définition subjective de l’information à tendance de dire que tout peut être « information ». Dans cette conception, l’objet n’est porteur d’information, de sens que par l’appréciation du sujet. Conception défendue par Éric Sutter[3] et Jean Michel « n’est information pour moi que ce à quoi je m’intéresse, Didier Frochot ».

Qu’est ce qu’une donnée ?

Pour définir le mot « donnée », nous partons d’un exemple tiré d’un site web[4].  Il n’est pas certain qu’un document soit directement porteur d’information. « L’exemple de la carotte géologique nous aide à comprendre qu’un document peut ne porter que des éléments propres à être identifiés comme porteurs d’informations significatives. En effet, cet extrait du sol va révéler des données qui, après analyse, vont donner du sens à celles-ci, ce qui s’appellera de l’information. Cette définition vaut pour tout document. Un simple papier, porteur d’un texte peut aussi s’analyser comme porteur de données (les signes alphabétiques) interprétables de manière à donner du sens : des mots du langage. Les signes sur le papier assemblés en mots sont décryptés par toute personne possédant les clés : la capacité de lire et la maîtrise de la langue (et de l’alphabet) en question. Il est donc un intermédiaire entre document et information : les données. Ces données sont d’ordinaire si vites analysées et assimilées par le cerveau qu’on ne prend pas le temps de décomposer le processus. Au sein de ces données, il est pourtant possible de subdiviser encore les éléments ».

En analysant cet exemple, vous pouvez remarquer qu’une «donnée» est ainsi appelée parce que tout simplement cela fait sens. 19 est un nombre qui est formé de deux chiffres : 1 et 9. Au-delà de cette explication basique, il n’a aucune signification particulière. Cependant les « 19 carottes » peuvent être considérées comme étant des données.

L’élément «  carottes » qui est ajouté donne sens au nombre « 19 ». Donc par définition, Données, « ce sont les plus petits éléments d’information portés par des données dites brutes ». 

Qu’est qu’une information ?

Étymologiquement, le mot « information » signifie « action de donner forme ». Autrement dit, ce qui donne forme à notre connaissance du monde extérieur ou de la réalité (B. de Gordon, 1495). Cette définition entre dans notre vision de l’éducation. L’éducation au même titre que l’information donne une forme à la connaissance ou à la réalité afin d’accéder au savoir. Si le mot « information » est souvent lié à la propagande, cela n’a pas toujours été ainsi. Car le mot « propagande » est aujourd’hui péjoratif. Il veut dire « répandre avec force ». En se référant à son étymologie « Pagere (pangere) » il exprime l’idée d’enfoncer, de renforcer.

Quand nous regardons les racines latines des mots « éducation »  et « formation », nous constatons une similitude au niveau étymologique. Educare, signifie « élever, instruire », et le fréquentatif educere signifie « faire sortir de, élever ». Cependant formation veut dire « façonner un être intellectuellement (Montaigne, Essais, p202).

Du latin formatio, « forme et confection ». Si aujourd’hui, le terme « information » est banni dans la transmission du savoir c’est qu’il est vraisemblablement vu comme de la manipulation. Cependant, dans l’acte de transmission du savoir, il y a essentiellement de la communication, donc les enseignants ne font que donner  forme à quelque chose. Autrement dit, ils transmettent de l’information.

Qu’est ce qu’une connaissance ?

Si nous essayons de définir le mot « connaissance » à partir de notre réflexion et des définitions préalables. La connaissance serait le décryptage des masses de données en information structurée. Aujourd’hui, notre société est plus que jamais conçue sur l’information. L’information n’est-elle pas porteuse de sens en transformant son contenu enconnaissance ?

Il est un fait incontestable que les entreprises[5] d’aujourd’hui transforment l’information en connaissances (connaissance du marché, connaissance de l’entreprise concurrente) afin d’anticiper sur un produit ou une campagne de publicité. Dans un dispositif de communication éducative médiatisée, comme les plateformes d’enseignement à distance via Internet, le « savoir ou contenu » diffusé n’est-il pas de la pure information pour l’apprenant ? Pour (Sfez[6], 1992) « toutes les technologies d’avant-garde, […] des biotechnologies à l’intelligence artificielle, de l’audiovisuel au marketing et à la publicité, s’enracinent en un seul principe : la communication ».

Qu’est ce qu’un savoir ?

Selon le « PETIT ROBERT, 2007 » ce mot a fait son apparition dans la langue française au moyen-âge (vers 1080). Issu du latin populaire « sapere », « avoir du goût, de la saveur », puis, « connaître, comprendre, savoir ». Le terme «  savoir[7] » est défini comme un ensemble de connaissances plus ou moins systématisées, acquises par une activité mentale suivie.

Cette approche que nous défendons dans ce travail de recherche est vivement critiquée dans le milieu enseignant. Ils préfèrent le terme de « contenu ou savoir» à l’information sans tenir compte de ce que nous appelons la « chaine de savoir ». Selon nous, pour arriver à acquérir un savoir, il existe tout un processus. Cette chaine passe par des données, des informations, des connaissances et pour finir au savoir.

Il ne s’agit pas de montrer ou expliquer quelles sont les stratégies d’apprentissage mobilisées par un élève pour apprendre ou acquérir un savoir. Car (Weinstein,1994) et bien d’autres chercheurs ont déjà bien démontré les logiques et stratégies d’apprentissage mobilisées par certains élèves. De notre point de vue, nous pensons que pour arriver au « savoir », il y a bien un ensemble de « mots » ou « concepts »  qui se croisent et parfois se confondent.

En guise de conclusion

Nous sommes conscients que l’information et savoir sont deux concepts distincts (Terzian & Béziat, 2006) mais nous sommes aussi convaincus qu’un ensemble de données crée l’information, un ensemble d’informations crée de la connaissance et un ensemble de connaissances donne lieu à un savoir.

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[1] Ingénieur en Télécommunication, ainsi que Warren WEAVER. Ils modélisent l’information pour étudier les lois correspondantes : bruit, entropie et chaos, par analogie générale aux lois d’énergétique et de thermodynamique. (1948-49)

[2] Célèbre professeur et Sir Fisher était biologiste et statisticien (1860-1962). Plusieurs fois récompensé pour ses travaux en statistiques, médaille de Darwin en 1948, médaille de Copley en 1955 et médaille d’argent de Darwin –Wallace en 1958. Il a introduit le concept de « l’information de Fisher » en statistique. Et considéré comme le précurseur de Shannon.

[3] Initiateur et auteur de nombreux ouvrages sur les activités d’information et de documentation, consultant en management des services d’information au bureau Van Dijk à Paris. (Dictionnaire de l’information, S. Cacaly, Y.F. Le Coadic, E. Sutter, et P.D Pomart, 2008, Ed. A. Colin.)

[4]   www.defidoc.com  structure de prestation en information et documentation – conseil et formation

[5] Les entreprises sont en guerre de l’information, alias infoguerre (en anglais infowar ou information warfare). C’est l’ensemble des méthodes et actions visant à infliger un dommage à un rival ou à se garantir une supériorité par l’acquisition d’information (données ou connaissances), par la dégradation des systèmes d’acquisition d’information de l’adversaire ou par des méthodes d’influence et de propagation de messages favorables à ses desseins stratégiques. Ce terme militaire issu du vocabulaire anglo-saxon est similaire à l’intelligence économique ou des technologies de l’information et de la communication. (L’observateur de l’OCDE, 2007 Bébés et Boulot, quels choix politiques)

[6]  Lucien SFEZ (1992) Critique de la communication. Paris : Ed. Seuil, pp.29-30

[7] Dans un sens plus large, le mot « savoir » est défini habituellement comme un ensemble de connaissances ou d’aptitudes reproductibles, acquises par l’étude ou l’expérience

Pour J.-M. Monteil (1985) l’information, c’est une donnée extérieure au sujet, elle est « sous le primat de l’objectivité »), la connaissance (elle est le résultat d’une expérience personnelle, elle est « sous le primat de la subjectivité ») et le savoir (c’est l’information appropriée par un sujet, elle est « sous le primat de l’objectivité ». Le savoir est « communicable » (Centre d’InterFACES – Pascale Prignon, 2003)

Author

  • Ralphson Pierre

    Directeur et Fondateur de OmniScient Info | Psychopédagogue | Technopédagogue | Doctorant en Technologie Educative | Spécialiste des TICE et de l'Education Inclusive/Spéciale (autisme)

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