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L’éducation, la pelle pour sortir Haïti de l’ornière

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« On a tout essayé, donnons une chance à l’éducation en Haïti… »  

En regardant le titre de l’article, il parait agaçant de ma part, lorsqu’on sait que depuis belle lurette des hommes de toutes tendances tâchent de faire des propositions de sortie de crise afin de retirer Haïti de cette galère qui semble interminable.

Cette galère, je dis bien, semble interminable… lorsqu’on sait que plus deux siècles après notre indépendance, les pièces du puzzle ne sont pas toujours réunies pour vivre selon le standard de notre épopée passée. Je rappelle qu’Haïti est toujours le pays le moins développé de l’hémisphère occidental. Dans le rapport d’indice du développement humain (IDH) du programme des Nations-Unis pour le développement (PNUD)  sorti en septembre 2018, Haïti est 168e mondial sur 189 pays. Le pays vit une instabilité politique comme pas possible. De 1804 à  2019 en Haïti, il n’y a pas moins de 51 personnalités qui ont occupé le fauteuil présidentiel contre 49  pour les Etats-Unis d’Amérique, par exemple indépendants depuis 1776.

De plus, nous tenons jusqu’à présent à un ensemble de paradigmes qui nous retiennent captifs.    » Depi nan ginen nèg rayi nèg « ,  » pito nou lèd nou la « . Tout cela ne fait que nous traîner dans l’ornière. Maintenant, la question à se poser : qu’est-ce qui peut faire sortir le pays de cette situation difficile ?

Ce qui peut nous sortir de là, n’est autre que l’éducation. Cela peut paraître saugrenu lorsqu’on sait que nous avons eu beaucoup d’hommes cultivés, instruits qui, depuis plus de deux siècles, dirigent le pays. Malgré tout, Haïti patauge toujours dans cette boue retardatrice. Alors où se trouve le problème ? Le problème est que les haïtiens sont éduqués pour devenir riche, avoir une belle maison uniquement, et non pour devenir un homme. Ainsi, au lieu de faire jouer à l’éducation le rôle qui lui revient, on lui fait jouer le rôle de gagne-pain uniquement. Du coup, nous nous démarquons de cette approche rousseauiste qui croit que dans le processus éducatif l’élève doit être au cœur, et on doit faire de lui un  » homme » non pas pour qu’il devienne avant un magistrat, un soldat ou un prêtre. L’éducation est bien le couteau suisse de la vie en général, et cela, ce philosophe français l’avait bien compris lorsqu’il disait :  

Nous naissons faibles, nous avons besoin de forces ; nous naissons dépourvus de tout, nous avons besoin d’assistance ; nous naissons stupides, nous avons besoin de jugement. Tout ce que nous n’avons pas à notre naissance et dont nous avons besoin en étant grand nous est donné par l’éducation [1].

L’éducation donne un cœur à l’homme, et ses processus sont comme l’oxygène qui assure la survie de ce cœur. Il faut apprendre à l’haïtien à devenir un homme. J’entends par  » être un homme » être patriotique, être nationaliste, être collectif et non individualiste pour proclamer le bien-être de sa nation dans le plus haut domaine des fonctions publiques.  Et pour parvenir à cet état d’homme fait le seul chemin à emprunter, c’est l’éducation. Cette assertion, Kant l’avait comprise quand il déclarait : l’homme ne peut devenir homme que par l’éducation[2]. » »

Une fois que nous ayons des hommes par l’éducation, aucun haïtien n’aura à l’esprit de violer la loi mère de la nation. L’éducation nous montrera le chemin à prendre comme Socrate[3], qui a choisi de mourir au lieu de poser un acte pouvant porter atteinte à la collectivité. Socrate était un homme !

Une fois que nous ayons des hommes par l’éducation, les haïtiens pourront s’asseoir autour de la table du dialogue pour prendre des décisions en faveur de la nation comme avait fait Mandela. Mandela était un homme ! De surcroit, n’avait-il pas raison de dire : « L’éducation est l’arme la plus puissante qu’on peut utiliser pour changer le monde. » Si l’éducation est vue en tant que telle, quelle sera alors son efficacité sur une presqu’île aussi petite que  notre république ?

En conclusion, l’éducation doit être la base sur laquelle s’édifie le mur du développement. Nous avons essayé beaucoup de prétendues solutions  comme propositions de sortie crise, Haïti s’enfonce pour la plus belle ! Cependant, je reste convaincu que si nous essayons l’éducation comme l’outil approprié, nous sortirons le pays de l’ornière. Cela ne se fera pas avec une baguette magique, dans l’imaginaire, mais avec les actions concrètes des différents acteurs concernés sous la bannière d’un état désireux de donner une chance à l’éducation.

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RUBRIQUE PAROLE LIBRE

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Kemberly PERISSIEN

Étudiant en Sciences de l’Éducation

Université INUKA


[1]  Jean Jacques Rousseau, Emile ou l’éducation, Livre 1 page 83.

[2]  Emmanuel Kant, Traitée  de pédagogie, Texte No 13

[3]Le Criton,   l’une des deux œuvres qui parlent des derniers instants de Socrate.

 

Author

  • Kemberly Perissien

    Rédacteur à Omniscient Info. Passionné de l'Enseignement et du journalisme utile. Etudiant en Sciences de l'éducation Mail: kemberly.perissien@omniscientinfo.com

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